Chant des calmines

Paroles recueillies dans CAP HORN livre de Henry-Jacques (1947)

Calme de la mer entre deux nuages.
Le vent s’est assoupi dans le berceau des mâts
Et la voile sans souffle étale un ventre plat.
Le flot respire, épais, tranquille,
Comme s’il n’était plus que miel et nappe d’huile.

Calme de la mer.

Les étais détendus poussent des cris rouillés.
Les vagues secouant lourdement leur collier
Tracassent la mâture et pleurent aux poulies :
Gentil vent de Suet, est-ce que tu m’oublies?
La toile se débat, convulsive, dans l’air,
Comme un poisson qui meurt au bout d’un fil de fer.

Calme de la mer.

C’est l’heure où le voilier oubliant son effort
Rêve d’un chemin sûr et tracé jusqu’au port.
Immobile, devant ses grandes cartes nues,
Le capitaine songe aux brises inconnues
Qui le transporteront vers le Sud, d’un seul bond,
Tribord amures, roi des Mers, et le seul bon.
Les hommes, étirant leur fatigue mouillée,
Se bercent d’une mer toujours ensoleillée,
Rêvent d’un beau voyage, étale, sans écarts,
Coupé comme un gâteau en de paisibles quarts,
Où grâce au vent fidèle il n’y a plus qu’à suivre
L’étoile du compas sous son dôme de cuivre.

Calme de la mer.

Le temps d’une pipe ou d’un bon sommeil.
Repos de l’âme et de la chair.
Rêve d’une heure entre deux veilles
Et paix des matelots, hommes de bon courage.
Le soleil bienfaisant, retour d’un long voyage,
A la pointe d’un mât se pose, jaune et rond,
Comme un vieux tournesol dont pendent les rayons.

Calme de la mer entre deux nuages.

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