Mac Orlan
I
Quand jean Marie de Nantes revint d’la Trinité,
Il déposa son sac aux pieds de son hôtesse
Dans un bar pavoisé par toutes les promesses,
Le bistrot de Simone à l’autre bout du quai
Qui donc a entendu cette vieille histoir’ là
Qui donc l’a raconté tout bas de porte en porte?
Chez Daisy ,chez Simone, ou chez Incarnita ?
Qui l’a confié au vent, au vent de la rue morte?
Refrain
Simone aime les matelots,
Les matelots aiment qui les aime
Et moi je peux penser de même
Car c’est là mon moindre défaut
Mais si la mer plaît aux bretons
C’est qu’elle les tient en son giron;
Et tant pis pour qui mal y pense
Ça n’a pas tellement d’importance.
II
Un homme qui revenait de Gibraltar, port franc,
Avait dit à Simone : « On ira en Afrique »
A Zanzibar au lieu de boulotter des briques,
Je te couvrirai d’or ou, qui vaut mieux d’argent.
Tu reviendra à Nantes quant il en sera temps
Dans le jour enchanté de notre indépendance
Quant à ton homme Simon’, c’est un affaire de sang,
Et çà n’a vraiment pas une telle importante
Refrain
Simone aime les matelots, les matelots
Les matelots aiment qui les aiment
Et moi je peux penser de même
Car c’est là mon moindre défaut.
Mais si la mer plaît aux Bretons
C’est qu’elle les tient en son giron ;
Et tant pis pour qui mal y pense,
Ça n’a pas tellement d’importance
III
Simone ne sut jamais le vrai mot de la fin,
Les cars de la police sonnaient partout l’alarme.
Les filles jacassaient au milieu du vacarme;
Et pendant quelques jours ce ne fut qu’un refrain
A peine chuchoté dans tous les clandestins
Un refrain qui n’était qu’un souvenir de bagarre,
Entre le gars de Nantes et l’homme du destin
Au moment historique où les couteaux s’égarent
Refrain
Simone aime les matelots.
Les matelots aiment qui les aime.
Incarnita pensait de même,
Moi je vais m’tirer au plus tôt.
J’irai me crécher à Meudon,
Devant la Seine et ses chansons
Pour prendre un bon coup d’innocence,
Et rien n’aura plus d’importance.