Préparatifs
Cette histoire commence le lundi 9 Juillet à Nantes, par une météo peu engageante – force 5 toute l’après-midi. Mais l’envie de découvrir le golfe du Morbihan est plus forte que l’appréhension d’affronter de mauvaises conditions météo. Et puis je me rappelle de ce dicton « Qui regarde trop la météo, passe sa vie au bistrot » … La carte marine du golfe (n°7034S) et le guide « Pilote côtier de Quiberon à La Rochelle » ( n° 5B) sont dans le coffre.
Les provisions sont également dans le sac : Une grande boite de maquereaux à l’escabèche de chez Furic, dégottée sur le port de commerce à Brest, dans ce magasin là, vous savez, où l’on trouve de l’excellent Whisky! les sardines sauce piquante, le pain, le litron et son tire-bouchon … bref tout y est.
Pour l’équipage je ne vous présente pas Fanch, qui crèche à TyFanchou dans le vignoble nantais, et qui a pour devise « on part à donf et on accélère progressivement ». Quelle âme de régatier ce Fanch! Quand à moi, il y a 2 mois que j’ai terminé Goustadig et je ne pense plus qu’à naviguer dessus.
Nous étudions la météo, la marée et les courants :
- La météo (3617 – météoconsult) prévoit pour le lendemain sur Port Navalo, 10 à 15 noeuds de vent avec effet de brise.
- La pleine mer à Port Navalo -le point de référence dans le golfe- est à 4h15, puis basse mer à 9h56, et re-pleine mer à16h37, par coefficient de 78. Pour Conleau, après correction en appliquant les corrections de Vannes (données sur la carte), nous pouvons donc compter sur une pleine mer à 6h15 et l’après midi à 18h30.
- Les courants de flot et les courants de jusant peuvent être très forts dans le chenal principal. Notre guide « pilote côtier » sera précieux pour l’identification des coins difficiles.
Nous quittons Nantes et arrivons au camping de Conleau à 20h00. Le dernier emplacement sera pour nous. Les places sont chères en cette saison!
Un repérage au bout de la presqu’île de Conleau nous permet de constater qu’une toute petite cale permet la mise à l’eau de notre Ilur aux alentours de la pleine mer. Nous mettrons donc à l’eau vers 7h30 le lendemain, soit 1h 15 après la PM.
Mais où irons-nous demain?…
Vu les coefficients de marée, notre méconnaissance totale de la navigation dans le golfe et l’incertitude météo (cela fait plusieurs jours que nous enregistrons du vent de Noroit de 4-5 Beaufort), nous optons pour une ballade dans la partie Est du golfe, sous le vent des îles et loin des courants du chenal principal qui mène à Port Navalo.
De Conleau à Pen Raz via Brouel
Réveil 7h00. Nous sautons dans nos shorts car la marée n’attends pas. Un café vite fait, un détour à la boulangerie pour acheter les croissants (pour la route!) et l’Ilur est à l’eau au bout de l’île Conleau à 7h45.
Fanch ramène la voiture et la remorque au camping ; je grée le Goustadig en attendant.
A 8h30 nous appareillons tranquillement à l’aviron. La passe qui mène au golfe nous fait découvrir Port Anna qui vaudrait certainement une escale. Nous laissons le rocher de Roguédas et sa tourelle verte à babord. Nous envoyons la misaine et vogue le Goustadig. Il y a de l’air ce matin. Le vent de Noroit commence à se lever, moins de 10 noeuds sans doute. Nous étalons tranquillement. Il faut dire que nos 2 fois 80 kg lestent remarquablement Goustadig ;-)
C’est là, en passant la cardinale de Boedig, que nous décidons d’emprunter le passage de Brouel entre l’île aux Moines et Arz, et de faire le tour de l’île d’Arz par le sud. Nous passons donc sous le vent des îles Logoden, les îles Drenec à babord. Pas facile malgré tout de s’y retrouver dans toutes ces îles! Pendant que Fanch barre le youyou j’assure la navigation carte en main. Y a-t’il du fond? Où sommes-nous sensé passer maintenant ? Du courant dans le coin ?
La bouée verte de Pirenn laissée à babord, nous retrouvons avantageusement le confort du portant alors que le vent a forci un petit peu. Nous relevons la dérive afin d’avancer le centre de dérive au maximum. Nous marchons bien à présent. Au portant l’Ilur file aussi vite que les croiseurs qui nous suivent depuis quelques instants. Je constate avec satisfaction qu’il n’est pas sujet au roulis rythmique.
Dans le goulet de Brouel (entre l’île aux Moines et l’île d’Arz) le vent s’oppose au courant de jusant, ce qui soulève un petit clapot, mais pas bien gênant pour l’Ilur à l’étrave bien aiguisée. Les croiseurs nous suivent toujours… Nous laissons la bouée rouge de la roche Colas à tribord, juste à la sortie de la passe de Brouel, pour virer vers le sud de l’île d’Arz. Le sud de l’île me semble un peu tristounet par ce matin gris. Les croiseurs loffent pour rejoindre le sud de l’île aux Moines; nos routes se séparent, nous les saluons comme il se doit.
Le moment le plus délicat de notre périple matinal nous attend : Le vent qui monte s’oppose à présent au courant de jusant et soulève un clapot qui va en s’amplifiant. Au sud de l’île d’Arz la pointe de Léos peut-être contournée au ras de la côte ou en laissant à babord la cardinale Sud de Drenec (décidément des Drénec y-en a plein le golfe!! du breton DRAEN-EG ->buisson très épineux).
En avançant vers ces cailloux (Le Drenec et les Cochons) nous apercevons rapidement des bouillonnements importants, signe de courants forts et de roches à fleur d’eau. Nous décidons d’arrondir largement notre route en longeant l’île ILUR – il s’agit bel et bien d’un retour aux sources de mon Goustadig :-)). Chahutés au niveau de la cardinale de Drenec nous retrouvons enfin des eaux plus clémentes dans le chenal entre Arz et Ilur (côté Ilur). Nous passons au ras de la bouée tribord au nord de l’île Ilur et traversons le chenal pour atteindre la cale de Pen Raz.
Nous apercevons des catamarans les rivages d’Arz (il s’agit à priori d’une base nautique de l’école de voile des Glénans) et un peu plus au nord le mouillage de Pen Raz. La carte indique une cale.
Nous débarquerons là sur l’île d’Arz à 11h00.
La vieille cale de pierre me semble bien accueillante. De part et d’autre de la cale, des zones d’échouages permettent à des voile-avirons de reposer sans problème sur de la vase « solide » ou du sable dans le haut.
La cale mène à un bois de pin qui invite au picnic. Le chemin que nous empruntons à présent mène au bourg, à 500 m. Et devinez où nous allons directement? Au bistrot boire un café bien mérité. Après un bref détour par l’épicerie nous rejoingnons le Goustadig, qui commence à manquer d’eau le long de la cale. Nous le mouillons en face de la plage.
La boite de maquereau Furic goulument achevée, le sort de notre litron jeté… un autre café au bistrot, et nous voila repartis pour de nouvelles aventures.
De Pen Raz à Conleau via l’île de Lern
Notre programme de l’après-midi est de revenir à Conleau.
Sur la carte nous envisagons donc de descendre plein sud, de contourner l’île Nous décidons de descendre dans le sud vers la pointe de Bernon, puis de contourner l’île Godec, Iluric par le sud, pour enfin remonter plein nord sur l’île de Lern.
13h30 le départ d’Arz. Vent faible, mer belle, marée descendante depuis 12h00 environ dans ce coin du golfe. Nous partons donc sous le vent d’Arz pour repasser à nouveau dans l’autre sens la cardinale de Drénec. Le vent monte et s’oriente Ouest, certainement sous l’effet des thermiques. Arrivés au niveau du passage entre Ilur et Iluric, la mer commence à moutonner légèrement et la brise montante nous oblige à prendre un premier ris.
Pour doubler l’île Godec nous devons remonter au plus près, ce qui met Goustadig au travers d’un clapot moutonneux. Cela commence à être mouille cul, et je comprends qu’avec un seul ris nous ne résisterons pas longtemps aux risées de cette brise d’ouest. Un puis 2 départs au lof. Je pense que cette brise d’Ouest ajoutée au courant de flot génère un clapot court, moutonneux à présent, et difficile à gérer sans embarquer de l’eau.
Je propose à Fanch de tracer une route entre Iluric et Godec pour ne pas rester au travers du clapot. Fanch analyse la carte. OK il y a du fond. On y va.
J’abats donc vers ce passage. Mais comment passer au travers de toutes ces perches qui ferment la passe à 50 m devant? STOP! Un 360° et nous revenons sur nos traces pour finalement empreinter la passe entre Ilur et Ilur.
Nous sommes vent arrière. Une seconde d’inattention à la barre (la dérive est également baissée) et je sens Goustadig loffer instantanément. Je révais d’un bateau ardent ; je suis servi. Fanch en sera quite pour une égratignure au tibia. Désolé!
Ce moment est magique. La longue, étroite et peu profonde passe semble si tranquille au portant. Les îles Ilur et Iluric, bordées de perches de parcs, s’écartent pour nous laisser passer. Le courant nul dans la passe, et la faible hauteur des berges nous procurent un abri exempt de clapot et sans survente.
A la sortie de la passe nous retrouvons sous le vent d’Iluric et prenons un cap quasi nord pour traverser cette nouvelle mer intérieure en direction de l’île de Lern. Nous saluons au passage une flottille de plaisanciers qui traquent le tacaud à l’abri d’Ilur.
Grand largue nous ne mettrons pas bien longtemps à avaler ces 2 milles jusque l’île de Lern. Droit devant la tourelle du Grand Rohu que l’on ne peut pas rater. Nous contournons l’île de Lern d’assez près et nous retrouvons quasi bout au vent, contraints à tirer des bords dans le chenal qui mène à la bouée de Boëdic.
Nous laissons la perche des Trois Pierres à tribord, la perche de l’Escobez à babord. Fanch me fait remarquer, au niveau de l’île de Boëd, que nous n’avançons plus guère. Un assez fort courant sévit sur la côte de l’île. Nous allons donc chercher des eaux plus calmes au sud pour remonter au près vers Boëdig.
Nous saluons au passage des dériveurs de l’école des Glénans que nous avions aperçu le matin en débarquant à Arz.
Une plate du golfe nous passe sous le nez, à donf comme dit Fanch. Son grément houari, son ponté à l’avant, son allure rustique mais sûre. Pour essayer de la rejoindre nous larguons le ris, mais c’est trop tard. Elle est déjà loin. Je reconnais néanmoins les talents du barreur de cette plate du golfe. Cette plate m’a vraiment impressionné par sa vitesse et son cap au près.
Après quelques ronds dans l’eau nous rallions Conleau. Un gros machin nous passe au ras des écoutilles (une espèce de péniche qui transporte en tout et pour tout un sac de ciment), puis une deuxième navette des îles, puis trois. Nous laissons la tourelle de Roguédas qui marque l’entrée de la rivière de Vannes sur tribord. Quel REUZ dans ce goulet, quel trafic ! Nous apercevons la fameuse maison rose à l’entrée du goulet.
Nous affalons maintenant car la pointe de Roguédas masque complètement le vent. Nous adoptons pour remonter dans le goulet la nage en pointe. C’est l’étale et le courant est quasi nul.
Nous accostons la plage de Conleau à 30m de la cale à 18h30. Fanch part immédiatement chercher la remorque au camping, pendant que je range le bazard que nous avons mis dans le Goustadig.
A 20h00 nous sommes à la pizzéria en terrasse sur les remparts de Vannes, à 22h00 au pub Guinness sur les quais de Vannes.
A l’année prochaine certainement, petite mer!!!
Les leçons de la ballade
Côté navigation
Sortir dans le golfe requiert une préparation minimum :
- Analyse des heures et coefficients de marées,
- Le point météo, force et vitesse du vent.
On en déduira le choix des cales de mise à l’eau et les parcours possibles en fonction des éléments.
Côté tourisme (!)
- Conleau, son camping et sa petite cale de mise à l’eau, plutôt satisfaisants.
- Vannes : Une pizzéria avec terrasse sur les remparts. Assez sympa. Et le pub Guinness sur le port de Vannes (rive gauche du port)…
- Pour la ballade, à ne pas râter le mouillage de Pen Raz. Un seul regret, nous n’avons pas eu le temps d’accoster Ilur et toutes ces petites îles.
Concernant le Goustadig (Ilur)
Je découvre Goustadig avec de plus en plus de satisfaction :
- Ce bateau est ardent (j’aime pas les bateaux mous!!)
- J’apprécie la dérive pivotante en acier que j’ai bricolée.
- La « barre d’écoute » remplace avantageusement le système de taquets à ertour d’écoute. Cette barre est en fait un bout qui passe par dessus la barre et qui traverse chaque équerre de tableau arrière. C’est réglable et surtout cela évite des virements de bord hasardeux.
- Le renforcement du ponté avant par 2 équerres horizontales (elles prologent le pontévers l’arrière de 25 cm) s’avère aussi une bonne idée. J’ai rencontré 3 constructeurs amateurs qui ont eu de réels soucis de solidité de l’ensemble Ponté avant/Plabord (éclatement/fissure du plabord sur des empannages).
- Concernant la misaine, le réglage du point de suspension de la vergue est vraiment la clé de tout. Je crois que pour Goustadig ce point est trouvé.
- Les capacités du bateau : Jusque force 3 (moins de 10 noeuds) ce bateau semble performant à la fois au près (qu’il serre assez bien) mais aussi au largue et au portant. A partir de 8-10 noeuds un premier ris est nécessaire et le second vers 15 noeuds (en supposant que 2 adultes bien constitués ;-) lestent le youyou). Au-delà je ne sais pas encore…