Chanson de Jean Matelot

Paroles recueillies dans CAP HORN livre de Henry-Jacques (1947)

Hôla ho, Jean Matelot!
Tu naquis un jour de brume,
Comme un crabe au bord de l’eau,
Fus baptisé par l’écume;
Hôla ho!
La mer crachant sur ta chair
Sa fascinante amertume
Grogna: cet enfant m’est cher!

Hôla ho! Jean Matelot!

C’était la marque éternelle.
Ton cœur, ton sang et ta peau,
Tout cela c’était pour elle.
Hôla ho!
Son ventre houleux et froid,
Sa rude ardeur de femelle,
Tout cela c’était pour toi.

Hôla ho! Jean Matelot!

Tout te tient : la nuit, l’orage,
Le vent, la barre, le flot,
Le calme plat, le nuage.
Hôla ho!
La mer joue avec ton corps,
Le roulis et le tangage
Te font sauter bord sur bord

Hôla ho! Jean Matelot!

Tes mains? Pour serrer la toile,
Pour crocher dans le morceau.
Tes doigts? Pour coudre la voile.
Hôla ho!
Tes yeux? Pour veiller la nuit,
Le feu, le phare ou l’étoile,
Le fanal qui stagne ou fuit.

Hôla ho! Jean Matelot!

Et ton cœur en balancine
De pirate ou de costaud,
Que fait-il dans ta poitrine ?
Hôla ho!
Il a ce bonheur amer
De souffrir pour la marine
Et d’en mieux aimer la mer.

Hôla ho! Jean Matelot!

Si la vieille te tourmente,
T’use la graisse et la peau,
Mène au port ton âme errante.
Hôla ho!
Mets sac a’ terre, demain,
La terre sera contente
Mais tu veux rester marin.

Hôla ho! Jean Matelot!

Va donc, chevaucheur de houle,
Adieu-vât, bon matelot
Que le vent du large saoule.
Hôla ho!
Mais que ce soit tôt ou tard
Il faudra bien que tu coules
Entre les mains du brouillard.

Hôla ho! Jean Matelot!

Une bouée pour couronne,
De toi, de ton nom, bientôt,
Qui se souviendra? Personne.
Hôla ho!
On dira : Jean est à l’eau,
Sur le cœur de sa patronne.
Il est mort en vrai mat’lot!

Hôla ho! Jean Matelot!

Pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés.